Marc Gindre ancien professeur en Sciences Economiques et Sociales. Jamais dans l’histoire de l’humanité nous avons autant prêté attention à notre corps. Conscients de ce qu’ils constituent une ressource fragile mais essentielle, dans cette « société des individus » qui est la nôtre, nous consacrons beaucoup de temps et d’argent pour le choyer, l’embellir et préserver notre capital santé et notre capital séduction. Nous sommes aussi invités sans cesse à améliorer ses performances, ses capacités physiques et intellectuelles, comme son apparence, tant elles sont valorisées sur le marché du travail et dans la sphère des sentiments amoureux. Ces injonctions prégnantes se heurtent, hélas ! à un mur de contradictions et de questions qui invitent à la réflexion. Comment satisfaire ces attentes lorsque, objectivement – et sans que nous puissions en être tenus pour responsables - nos conditions de travail et de vie et notre alimentation mettent nos corps en souffrances et l’abiment, réduisant drastiquement notre espérance de vie en bonne santé ? Comment expliquer cette quête effrénée et croissante de performances sportives qui met nos corps à rude épreuve et prépare le terrain de graves pathologies futures ? Comment expliquer enfin cet engouement croissant pour des pratiques sportives qui – dans une démarche choisie et consciente – nous condamnent à supporter les pires souffrances, et parfois nous conduisent à frôler la mort, alors que, par ailleurs, nous ressentons un besoin impérieux d’évacuer tout risque dans nos vies ? Qu’est-ce que ces contradictions disent de nous, de notre époque et de la société dans laquelle